Un matin ordinaire au Port de Sète

Il est 4h du matin dans cette nuit noire et cotonneuse.

Encore engourdi par un sommeil trop court, je suis assis dans cette pilotine accompagné par Monsieur le Pilote et l’expert en marchandises sensibles. Mission : contrôle sur le navire resté sur rade avant son accostage.

La pilotine, navire fragile, trace son passage dans cette brume têtue, elle éclaire sa route pas son unique phare qui troue la nuit.

Peu après une forme apparaît, irréelle, massive, le navire nous attend, ses feux de position sont comme des étoiles accrochées sur un ciel d’encre.

Directement nous sommes positionnés sur ses flancs où déjà est suspendue l’échelle de cordes qui apparaît soudain comme surgie du néant. Heureusement la mer est calme, j’en suis même surpris. Sans repères je monte sur ce pont humide aidé par l’équipage.  Je monte directement au bureau du capitaine. Nous nous retrouvons tous dans ce réduit surchauffé à odeur de gas-oil encore empreint de cette atmosphère indéfinissable d’horizons lointains..

Je donne mes directives pour l’escale, l’expert est déjà dans la cale pour son rapport.

Quelques minutes plus tard je rejoins Monsieur le Pilote dans le poste de commandement.

Déjà le navire glisse doucement, fantomatique, je le vois grâce aux lumières du port, au loin, elles bougent.. . La machine ronronne, fidèle, je sens son abattement.

Glissant sur une mer apaisée, traversant la brume tenace, le navire avance, plongés dans l’obscurité, nos visages ne sont éclairés que par les écrans de contrôle. Monsieur le Pilote donne ses ordres, ils sont brefs, assurés, impératifs, le timonier s’exécute,  en silence, sous l’œil du capitaine.

Bientôt nous accosterons, déjà les lamaneurs, ombres furtives, sont sur le quai, ils fixeront nos amarres, ils sont prêts à nous servir. Tout à l’heure, les grues reprendront vie et sur ce quai, encore désert, s’activeront les équipes.

Un matin ordinaire sur le port de Sète.

FRANCIS P.